LE ROMAN : Le roman et ses personnages : visions de l'homme et du monde


"La classe de seconde, reprenant les lectures et les connaissances acquises au collège, a permis de mettre en place, d'une part les caractéristiques typologiques du genre romanesque, et d'autre part les particularités respectives du récit bref (la nouvelle) et du récit plus développé." (BO nov. 2006)

"L'étude du roman en classe de première ne doit pas apparaître comme une nouveauté pour l'élève."

"La classe de première, en prenant pour entrée privilégiée l'étude des personnages, se donne pour objectif -- à travers l'étude approfondie d'une oeuvre, éclairée par des textes complémentaires et des lectures cursives -- de compléter la culture romanesque des élèves, en leur permettant d'acquérir des repères historiques essentiels." (BO nov. 2006)


EAF 2008 – Dissertation (1ères S et ES)
En partant des textes du corpus, vous vous demanderez si la tâche du romancier, quand il crée des personnages, ne consiste qu'à imiter le réel. Vous vous appuierez aussi sur vos lectures personnelles et les œuvres étudiées en classe.


« La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature ».

Cette citation de Marcel Proust extraite du Temps retrouvé vous permet-elle d'éclairer la façon dont le romancier exprime une pensée sur l'homme et sur le monde ? Vous appuierez votre réflexion sur les romans que vous avez lus et étudiés.


L'art et le réel : Le roman serait "comme un miroir qu'on promène avec soi ». Comment comprenez-vous cette comparaison de Stendhal ?

Sujet de dissertation, p. 539 (manuel de français de 2de), Terres littéraires (Hatier)

Stendhal a écrit : « Un roman : c'est un miroir qu'on promène le long d'un chemin » (Le Rouge et le Noir, I, XIII) mais aussi : « Toute oeuvre d'art est un beau mensonge ». Dans quelle mesure ce paradoxe s'applique-t-il aux textes du corpus, et aux romans, naturalistes ou non, que vous avez lus.

  1. Commentez ce point de vue du philosophe Alain : "Le thème de tout roman, c'est le conflit d'un personnage romanesque avec des choses et des hommes qu'il découvre en perspective à mesure qu'il avance, qu'il connaît d'abord mal, et qu'il ne comprend jamais tout à fait." (Système des Beaux-Arts, 1920).

Vous prendrez pour exemples les textes du corpus ainsi que les oeuvres romanesques que vous avez lues et étudiées.


  1. Dans son essai sur Les Personnages, Sylvie Germain, romancière contemporaine, écrit : « Tous les personnages sont des dormeurs clandestins nourris de nos rêves et de nos pensées. »

Cette conception du personnage vous paraît-elle partagée par les romanciers que vous connaissez ? Vous appuierez votre réponse sur les textes du corpus et ls oeuvres romanesques que vous avez lues.


  1. André Maurois (1885-1967) écrit : « Un personnage de roman est simplifié et construit. On peut le comprendre. Dans la vie réelle, les êtres vivants sont des énigmes dangereuses. »

Expliquez, commentez et discutez cette appréciation en vous fondant sur les textes du corpus et vos lectures.


  1. Parlant du monde romanesque et de ses personnages, Albert Camus écrit dans L'Homme révolté : « Les héros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces. Leur univers n'est ni plus beau ni plus édifiant que le nôtre. Mais eux, du moins, courent jusqu'au bout de leur destin et il n'est jamais de si bouleversants héros que ceux qui vont jusqu'à l'extrémité de leur passion. »

Vous expliciterez et illustrerez ce point de vue à partir de vos lectures romanesques et vous le discuterez si cela vous semble nécessaire.


  1. En parlant de ses héros, et avant d'écrire Madame Bovary, Flaubert déclarait : "Ce qu'ils sont maintenant, ce qu'ils font, ce qu'ils rêvent est le résultat de ce qu'ils ont été, de ce qu'ils ont fait, de ce qu'ils ont rêvé."

Cette affirmation vous semble-t-elle correspondre à la définition d'un personnage de roman ou correspond-elle plus étroitement à celle du XIXème siècle ? Cette conception a-t-elle évolué ? Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur les textes du corpus et sur vos lectures personnelles.


  1. Julien Green (1900-1998) écrit à propos de son roman Leviathan (1928) : "Voici la vérité sur ce livre : je suis tous les personnages."

A partir de votre expérience de lecteur de romans, vous vous interrogrez sur la relation qui unit un auteur à ses personnages dans le cadre d'une fiction romanesque.


  1. Jean-Paul Sartre a dit de Nathalie Sarraute : "Elle a mis au point une technique qui lui permet d'atteindre, par-delà la psychologie, la réalité humaine dans son existence même."

Sartre souligne ici le fait que c'est l'existence même du personnage, c'est-à-dire ses gestes, ses actes, ses paroles, qui constitue sa réalité, et non une analyse psychologique livrée par l'auteur. Que pensez-vous de cette conception de la construction du personnage romanesque ?

Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur les textes du corpus et vos lectures personnelles.


  1. On peut considérer à toutes les époques qu'un roman est moderne "si on entend par modernité le mouvement d'une littérature qui, perpétuellement en quête d'elle-même, s'interroge, se met en cause, fait de ses doutes et de sa foi à l'égard de son propre message le sujet même de ses écrits".

En vous appuyant sur les textes du coprus et les romans que vous avez lus et étudiés, commentez cette afirmation d'un critique et dites si vous adhérez à cette définition du "roman moderne".


  1. L'écrivain contemporain Claude Roy écrit dans Défense de la littérature : "certains esprits refusent le roman. Ils y voient une amusette, un gaspillage de forces. Ils trouvent la vie (ou l'Histoire) plus riche en histoires, la science plus excitante, et que la philosophie donne mieux à penser. "Comment peut-on lire des romans ? Moi, Monsieur, je ne lis que des Mémoires. Et moi, que des traités scientifiques. Pas de temps à perdre"! ". Vous direz, en vous appuyant sur les textes du corpus, sur vos lectures et sur les romans que vous avez étudiés, ce que vous pensez de ce jugement sur les romans rapporté par Claude Roy.


Problématique : on a souvent reproché au roman d'entretenir les rêves et les illusions du lecteur. (le "bovarysme")


"Romanesque" est un adjectif souvent utilisé péjorativement pour qualifier des histoires invraisemblables, des aventures extraordinaires, des sentiments excessifs, loin de toute réalité. En vous fondant sur les textes du corpus et sur la lecture des romans que vous avez lus et étudiés, vous réhabiliterez cette notion de "romanesque", en montrant combien elle participe du plaisir singulier de la lecture de romans.



Selon vous, une histoire intéressante suffit-elle à faire un bon roman ?

Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur les textes du corpus, les oeuvres étudiées en classe et vos lectures personnelles.


Guy de Maupassant écrit à propos du romancier : "Son but n'est point de nous raconter une histoire, de nous amuser ou de nous attendrir", mais "c'est [sa] vision personnelle du monde qu'il cherche à nous communiquer". Partagez-vous cette opinion ?

Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur les textes du corpus, les oeuvres étudiées en classe et vos lectures personnelles.


Pour exister, un personnage de roman doit-il nécessairement réussir ?

Vous réfléchirez à cette question en vous aidant du corpus mis à votre disposition, des oeuvres que vous avez lues en classe et de vos lectures personnelles.


Pensez-vous qu’un héros de roman doive être nécessairement un personnage capable d’accomplir des exploits extraordinaires ?

Vous réfléchirez à cette question en vous aidant du corpus mis à votre disposition, des

oeuvres que vous avez lues en classe et de vos lectures personnelles.


Selon l'écrivain Jacques Lacarrière, "les gens ne s'intéressent pas aux héros heureux. Il leur faut du tragique, du mythique, du monstrueux, du terrifiant". Vous expliciterez et justifierez ce propos en l'illustrant puis vous le discuterez si cela vous paraît nécessaire.


Un personnage médiocre peut-il faire un héros de roman ?

Vous répondrez à cette question à partir des textes et des oeuvres que vous avez lus et/ou étudiés.


Quelle place le roman peut-il et doit-il faire à l'Histoire ?

Vous appuierez votre réflexion sur des textes littéraires précis et variés.


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L'écrivain contemporain Claude Roy écrit dans Défense de la littérature : certains esprits refusent le roman. Ils y voient une amusette, un gaspillage de forces. Ils trouvent la vie (ou l'Histoire) plus riche en histoires, la science plus excitante, et que la philosophie donne mieux à penser. "Comment peut-on lire des romans ? Moi, Monsieur, je ne lis que des Mémoires. Et moi que des traités scientifiques. Pas de temps à perdre!"

Vous direz, en vous appuyant sur les textes du corpus, sur vos lectures et sur les romans que vous avez étudiés, ce que vous pensez de ce jugement sur les romans rapporté par Claude Roy.


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Objet d'étude : le roman et ses personnages ; visions de l'homme et du monde.
Textes :
Texte A - Honoré de Balzac, Le Chef-d'œuvre inconnu, 1832.
Texte B - Victor Hugo, L'Homme qui rit, 1869.
Texte C - Emile Zola, L'Assommoir, 1877.
Texte D - Marcel Proust, Le Temps Retrouvé, 1927.

TEXTE A - Honoré de Balzac, Le Chef-d'œuvre inconnu.

[L'action de ce roman se déroule en 1612. Fraîchement débarqué à Paris, un jeune peintre ambitieux, Nicolas Poussin, se rend au domicile de Maître Porbus, un célèbre peintre de cour, dans l'espoir de devenir son élève. Arrivé sur le palier, il fait une étrange rencontre.]

Un vieillard vint à monter l'escalier. À la bizarrerie de son costume, à la magnificence de son rabat1 de dentelle, à la prépondérante sécurité de la démarche, le jeune homme devina dans ce personnage2 ou le protecteur ou l'ami du peintre ; il se recula sur le palier pour lui faire place, et l'examina curieusement, espérant trouver en lui la bonne nature d'un artiste ou le caractère 5 serviable des gens qui aiment les arts ; mais il aperçut quelque chose de diabolique dans cette figure, et surtout ce je ne sais quoi qui affriande3 les artistes. Imaginez un front chauve, bombé, proéminent, retombant en saillie sur un petit nez écrasé, retroussé du bout comme celui de Rabelais ou de Socrate ; une bouche rieuse et ridée, un menton court, fièrement relevé, garni d'une barbe grise taillée en pointe, des yeux vert de mer ternis en apparence par l'âge, mais qui par le contraste du blanc nacré dans lequel flottait la prunelle devaient parfois jeter des regards magnétiques au fort de la colère ou de l'enthousiasme. Le visage était d'ailleurs singulièrement flétri par les fatigues de l'âge, et plus encore par ces pensées qui creusent également l'âme et le corps. Les yeux n'avaient plus de cils, et à peine voyait-on quelques traces de sourcils au-dessus de leurs arcades saillantes. Mettez cette tête sur un corps fluet et débile4, entourez-la d'une dentelle étincelante de blancheur et travaillée comme une truelle à poisson5, jetez sur le pourpoint6 noir du vieillard une lourde chaîne d'or, et vous aurez une image imparfaite de ce personnage auquel le jour faible de l'escalier prêtait encore une couleur fantastique. Vous eussiez dit d'une toile de Rembrandt7 marchant silencieusement et sans cadre dans la noire atmosphère que s'est appropriée ce grand peintre.

1 rabat : grand col rabattu porté autrefois par les hommes.
2. Ce vieillard s'appelle Frenhofer.
3. affriande : attire par sa délicatesse.
4 débile : qui manque de force physique, faible.
5 truelle à poisson : spatule coupante servant à découper et à servir le poisson.
6 pourpoint : partie du vêtement qui couvrait le torse jusqu'au-dessous de la ceinture.
7 Rembrandt : peintre néerlandais du XVIIe siècle. Ses toiles exploitent fréquemment la technique du clair-obscur, c'est-à-dire les effets de contraste produits par les lumières et les ombres des objets ou des personnes représentés.

TEXTE B - Victor Hugo, L'Homme qui rit.

[L'action se déroule en Angleterre, à la fin du XVIle siècle. Enfant, Gwynplaine a été enlevé par des voleurs qui l'ont atrocement défiguré pour en faire un monstre défaire : ses joues ont été incisées de la bouche aux oreilles, de façon à donner l'illusion d'un sourire permanent. Devenu adulte, il se produit dans une troupe de comédiens.]

Quoi qu'il en fût, Gwynplaine était admirablement réussi. Gwynplaine était un don fait par la providence à la tristesse des hommes. Par quelle providence ? Y a-t-il une providence Démon comme il y a une providence Dieu ? Nous posons la question sans la résoudre. Gwynplaine était un saltimbanque. Il se faisait voir en public. Pas d'effet comparable au sien. Il guérissait les hypocondries1 rien qu'en se montrant. [...] C'est en riant que Gwynplaine faisait rire. Et pourtant il ne riait pas. Sa face riait, sa pensée non. L'espèce de visage inouï que le hasard ou une industrie bizarrement spéciale lui avait façonné, riait tout seul. Gwynplaine ne s'en mêlait pas. Le dehors ne dépendait pas du dedans. Ce rire qu'il n'avait point mis sur son front, sur ses joues, sur ses sourcils, sur sa bouche, il ne pouvait l'en ôter. On lui avait à jamais appliqué le rire sur le visage. C'était un rire automatique, et d'autant plus irrésistible qu'il était pétrifié. Personne ne se dérobait à ce rictus. Deux convulsions de la bouche sont communicatives, le rire et le bâillement. Par la vertu de la mystérieuse opération probablement subie par Gwynplaine enfant, toutes les parties de son visage contribuaient à ce rictus, toute sa physionomie y aboutissait, comme une roue se concentre sur le moyeu2 ; toutes ses émotions, quelles qu'elles fussent, augmentaient cette étrange figure de joie, disons mieux, l'aggravaient. Un étonnement qu'il aurait eu, une souffrance qu'il aurait ressentie, une colère qui lui serait survenue, une pitié qu'il aurait éprouvée, n'eussent fait qu'accroître cette hilarité des muscles ; s'il eût pleuré, il eût ri ; et, quoi que fit Gwynplaine, quoi qu'il voulût, quoi qu'il pensât, dès qu'il levait la tête, la foule, si la foule était là, avait devant les yeux cette apparition, l'éclat de rire foudroyant. Qu'on se figure une tête de Méduse gaie.

1. hypocondries : états dépressifs et mélancoliques.
2. moyeu : pièce centrale d'une roue.

TEXTE C - Emile Zola, L'Assommoir.

[Dans L'Assommoir, Zola décrit le milieu des ouvriers parisiens. Le roman retrace l'itinéraire de Gervaise, une modeste blanchisseuse. Dans l'extrait suivant, elle rend visite à Goujet, surnommé Gueule-d'Or,]

C'était le tour de la Gueule-d'Or. Avant de commencer, il jeta à la blanchisseuse un regard plein d'une tendresse confiante. Puis, il ne se pressa pas, il prit sa distance, lança le marteau de haut, à grandes volées régulières. Il avait le jeu classique, correct, balancé et souple. Fifine, dans ses deux mains, ne dansait pas un chahut de bastringue1, les guibolles2 emportées par-dessus les jupes; elle s'enlevait, retombait en cadence, comme une dame noble, l'air sérieux, conduisant quelque menuet3 ancien. Les talons de Fifine tapaient la mesure, gravement, et ils s'enfonçaient dans le fer rouge, sur la tête du boulon, avec une science réfléchie, d'abord écrasant le métal au milieu, puis le modérant par une série de coups d'une précision rythmée. Bien sûr, ce n'était pas de l'eau-de-vie que la Gueule-d'Or avait dans les veines, c'était du sang, du sang pur, qui battait puissamment jusque dans son marteau, et qui réglait la besogne. Un homme magnifique au travail, ce gaillard-là ! Il recevait en plein la grande flamme de la forge. Ses cheveux courts, frisant sur son front bas, sa belle barbe jaune, aux anneaux tombants, s'allumaient, lui éclairaient toute la figure de leurs fils d'or, une vraie figure d'or, sans mentir. Avec ça, un cou pareil à une colonne, blanc comme un cou d'enfant ; une poitrine vaste, large à y coucher une femme en travers ; des épaules et des bras sculptés qui paraissaient copiés sur ceux d'un géant, dans un musée. Quand il prenait son élan, on voyait ses muscles se gonfler, des montagnes de chair roulant et durcissant sous la peau ; ses épaules, sa poitrine, son cou enflaient ; il faisait de la clarté autour de lui, il devenait beau, tout-puissant, comme un Bon Dieu.

1. bastringue : cabaret.
2 guibolles : jambes (dans la langue populaire).
3 menuet : danse.

TEXTE D - Marcel Proust, Le Temps retrouvé.

[Le Temps Retrouvé est le dernier tome d'À la recherche du temps perdu, vaste fresque dans laquelle l'auteur transpose l'expérience de sa vie. Retiré du monde depuis plusieurs années, le narrateur se rend à une soirée mondaine lors de laquelle il croise d'anciennes connaissances « métamorphosées » par la vieillesse.]

Le vieux duc de Guermantes ne sortait plus, car il passait ses journées et ses soirées avec elle1. Mais aujourd'hui, il vint un instant pour la voir, malgré l'ennui de rencontrer sa femme. Je ne l'avais pas aperçu et je ne l'eusse sans doute pas reconnu, si on ne me l'avait clairement désigné. Il n'était plus qu'une ruine, mais superbe, et moins encore qu'une ruine, cette belle1 chose romantique que peut être un rocher dans la tempête. Fouettée de toutes parts par les vagues de souffrance, de colère de souffrir, d'avancée montante de la mort qui la circonvenaient2, sa figure, effritée comme un bloc, gardait le style, la cambrure que j'avais toujours admirés ; elle était rongée comme une de ces belles têtes antiques3 trop abîmées mais dont nous sommes trop heureux d'orner un cabinet de travail. Elle paraissait seulement appartenir à une époque plus ancienne qu'autrefois, non seulement à cause de ce qu'elle avait pris de rude et de rompu dans sa matière jadis plus brillante, mais parce qu'à l'expression de finesse et d'enjouement avait succédé une involontaire, une inconsciente expression, bâtie par la maladie, de lutte contre la mort, de résistance, de difficulté à vivre. Les artères ayant perdu toute souplesse avaient donné au visage jadis épanoui une dureté sculpturale. Et sans que le duc s'en doutât, il découvrait des aspects de nuque, de joue, de front, où l'être, comme obligé de se raccrocher avec acharnement à chaque minute, semblait bousculé dans une tragique rafale, pendant que les mèches blanches de sa magnifique chevelure moins épaisse venaient souffleter de leur écume le promontoire envahi du visage. Et comme ces reflets étranges, uniques, que seule l'approche de la tempête où tout va sombrer donne aux roches qui avaient été jusque-là d'une autre couleur, je compris que le gris plombé des joues raides et usées, le gris presque blanc et moutonnant des mèches soulevées, la faible lumière encore départie aux yeux qui voyaient à peine, étaient des teintes non pas irréelles, trop réelles au contraire, mais fantastiques, et empruntées à la palette, à l'éclairage, inimitable dans ses noirceurs effrayantes et prophétiques, de la vieillesse, de la proximité de la mort.

  1. II s'agit d'Odette, sa maîtresse.

  2. circonvenir : agir sur quelqu'un avec rase, pour parvenir à ses fins.

  3. têtes antiques : sculptures de la tête.

ECRITURE :

  1. Vous répondrez d'abord à la question suivante (4 points) :


    Dans quelle mesure ces portraits prennent-ils appui sur le réel, dans quelle mesure le transposent-ils ? Votre réponse n'excédera pas une trentaine de lignes.

  1. Vous traiterez ensuite l'un des trois sujets suivants (16 points) :


    1. Commentaire
    Vous ferez un commentaire du texte de Balzac (texte A).


    2. Dissertation
    En partant des textes du corpus, vous vous demanderez si la tâche du romancier, quand il crée des personnages, ne consiste qu'à imiter le réel. Vous vous appuierez aussi sur vos lectures personnelles et les œuvres étudiées en classe.


    3. Invention
    Le narrateur du Temps retrouvé croise une femme qu'il a aimée dans sa jeunesse et pour laquelle il conserve une vive affection. Il perçoit, sous ses traits vieillissants, les traces de sa beauté d'autrefois. En vous inspirant de l'extrait proposé (texte D), vous imaginerez la description qu'il pourrait en faire.


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Sujets de dissertation sur la lecture


1. Comment ses lectures invitent-elles le jeune lecteur à réfléchir sur le sens de sa vie ?


2. « Un « classique » est un livre qui n’a jamais fini de dire ce qu’il a à dire ».

Commentez et illustrez cette définition d’Italo Calvino à partir des « classiques » que vous avez lus ou étudiés.


3. Dans un roman, la fiction narrative est-elle toujours au service d’un projet didactique ?

Vous développerez votre point de vue à partir de l’analyse d’exemples précis puisés dans vos lectures.


4. "La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver."

Votre expérience de la lecture vous conduit-elle à souscrire à ce propos de Jean Guéhenno ?


5. Que représentent pour vous les héros de la littérature ?

Vous vous demanderez ce que signifie ce besoin d'admirer des êtres de fiction, de les aimer ou de les imiter, et vous appuierez votre réflexion sur des exemples pris dans vos lectures ou dans les œuvres que vous avez étudiées.


6. Les héros de la littérature sont-ils toujours exemplaires ?

Vous développerez votre réflexion à l'aide d'exemples précis empruntés à vos lectures.


7. On a souvent reproché au roman d'être un simple divertissement.

Montrez qu'il peut répondre à d'autres objectifs.


8 "Par un roman, on a entendu jusqu'à ce jour un tissu d'événements chimériques et frivoles, dont la lecture était dangereuse pour le goût et pour les mœurs".

Que pensez-vous de cette définition du roman donnée par Diderot dans son "Eloge de Richardson", publié en 1761 dans le Journal étranger et croyez-vous qu'elle puisse s'appliquer aux romans que vous avez lus ou étudiés ?


9. "Ceux qui croient que lire est une fuite sont à l'opposé de la vérité : lire, c'est être mis en présence du réel dans son état le plus concentré."

Partagez-vous cette définition de la lecture donnée par Amélie Nothomb dans Antéchrista ? Justifiez votre réponse et illustrez-la à partir d'exemples précis empruntés à vos lectures.


10 "Les lectures de l'adolescence ont beaucoup avancé ma formation. Il fut un temps où les personnages des romans m'étaient plus familiers et mieux connus que les humains. Julien Sorel, Fabrice Del Dongo, Rastignac, Emma Bovary, David Copperfield étaient mes compagnons d'esprit ; il m'arrivait de me guider sur eux."

En comparant votre expérience de jeune lecteur à celle de Gabriel Chevallier, vous préciserez quel genre de rapports vous entretenez avec les héros de la fiction littéraire ou artistique.


11. "J'ai essayé de faire de vous de bons lecteurs, qui lisent non dans le but infantile de s'identifier aux personnages du livre, ni dans le but adolescent d'apprendre à vivre, ni dans le but académique de s'adonner aux généralisations. J'ai essayé de vous apprendre à lire les livres pour leur forme, pour leurs visions, pour leur art. J'ai essayé de vous apprendre à éprouver un petit frisson de satisfaction artistique, à partager non point une émotion des personnages du livre, mais les émotions de son auteur. Les joies et les difficultés de la création. Nous n'avons pas glosé autour des livres, à propos des livres, nous sommes allés au centre de tel ou tel chef-d'œuvre, au cœur même du sujet."

Vous direz quelles réflexions ces propos de l'écrivain Vladimir Nabokov à ses étudiants vous inspirent en vous référant à votre pratique personnelle des textes littéraires et en vous appuyant sur des exemples précis.



12. "Réfléchissant sur Illusions perdues , un critique contemporain écrit : " Ce roman est – comme la plupart des grands romans balzaciens – une "moralité". Et comme dans les autres romans, c'est la "moralité" qui fait de l'étude sociologique un roman, c'est elle qui fournit au texte sa structure et sa cohérence romanesque."

Que pensez-vous de cette définition du roman balzacien ? Pensez-vous qu'elle puisse s'appliquer aux romans que vous avez lus en général ?


13. "La vraie vie […] c'est la littérature".

Que pensez-vous de cette affirmation paradoxale de Marcel Proust ?


14. André Gide a écrit : "Inquiéter, tel est mon rôle. Le public préfère toujours qu'on le rassure. Il en est dont c'est le métier. Il n'en est que trop."

Que pensez-vous de cette conception de la littérature ? Vous développerez votre réflexion à l’aide d’exemples précis empruntés à vos lectures.


15. "Les meilleurs livres sont ceux dont les lecteurs font eux-mêmes la moitié".

Comment comprenez-vous ce propos de Voltaire ? Développez votre réflexion à l'aide d'exemples précis empruntés à vos lectures.


16. " Un roman réaliste est un roman qui fait vivre devant nous dans un cadre minutieusement décrit – dont ils sont au reste inséparables – des personnages qui sont à la fois des types et des individus."

Vous commenterez ce jugement en vous appuyant sur des exemples précis empruntés aux romans réalistes que vous avez étudiés et sur les textes du corpus.


17. Les personnages d'un roman d'apprentissage apprennent-ils vraiment quelque chose ?

Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur des exemples précis empruntés aux romans d'apprentissage que vous avez étudiés et sur les textes du corpus.


18. Dans les grands romans de formation du XIXème siècle, quels sont les éléments qui favorisent l'apprentissage du héros ?

Vous répondrez à cette question en un développement composé, prenant appui sur les textes du corpus et sur ceux que vous avez lus et étudiés.


19. Vous commenterez et discuterez, en vous appuyant sur des exemples précis, cette réflexion de Nathalie Sarraute : « Je croyais que le roman, pour parler avec Flaubert, doit toujours apporter de nouvelles formes et une nouvelle substance. Et je croyais que l’on ne doit écrire que si l’on éprouve quelque chose que d’autres écrivains n’ont pas exprimé. »


20. Dans un entretien avec Michelle Porte, Marguerite Duras déclare : « Je me méfie ; je ne sais jamais très bien où je vais. Si je le savais, je n’écrirais pas. Puisque c’est fait, ce serait fait ; je ne comprends pas comment on peut écrire une histoire déjà explorée. »

Comment comprenez-vous ces propos de Marguerite Duras ? Vous développerez votre point de vue à partir d’exemples précis empruntés à vos lectures.


21. « Toutes les grandes œuvres transforment la façon dont nous voyons et rencontrons le monde, et par conséquent transforment le monde. »

Que pensez-vous de cette affirmation de Michel Butor dans Essais sur le roman et croyez-vous qu’elle puisse s’appliquer aux œuvres que vous avez lues et étudiées ?


22. Pensez-vous avec André Malraux que le rôle de l’écrivain est de « tenter de donner conscience à des hommes de la grandeur qu’ils ignorent en eux » ?

Vous illustrerez et discuterez cette définition d’André Malraux à partir d’exemples littéraires.


23. « Un beau livre, c’est celui qui sème à foison des points d’interrogation. »

Pensez-vous que cette définition de Jean Cocteau puisse s’appliquer aux romans que vous avez lus ou étudiés ?


24. « Le meilleur de l’homme, c’est l’inquiétude ».

Comment comprenez-vous cette pensée de Goethe ? Essayez de l’expliquer et de l’illustrer en prenant appui sur vos lectures.


25. Que pensez-vous de cette formule des « nouveaux romanciers » qui proposent de substituer « l’aventure d’une écriture à l’écriture d’une aventure » ?

Vous développerez votre point de vue à partir de l’analyse d’exemples précis de vos lectures.